• OPPOSANTS DISPARUS: RAPPORT ACCABLANT POUR N'DJAMÉNA

    Opposants disparus : rapport accablant pour N’Djamena
    Diane Lebel
    SOURCE: QUOTIDIEN LIBÉRATION : mardi 26 février 2008
     Alors que la France multiplie, toujours sans succès, les demandes «d’informations» et «d’éclaircissements» sur le sort des opposants tchadiens disparus, un rapport d’Human Rights Watch (HRW) accable clairement les autorités de N’Djamena. Ibni Oumar Mahamat Saleh, le porte-parole de la principale coalition de l’opposition, et Ngarlejy Yorongar, un député fédéraliste, sont portés disparus depuis le 3 février, au moment de l’offensive rebelle sur la capitale. Leurs familles sont sans nouvelles d’eux, et plus étonnant, le gouvernement assure ne pas en savoir plus et propose même d’ouvrir une enquête.

    Peu de doutes. Les témoignages recueillis par la très respectée ONG américaine à N’Djamena laissent peu de doutes sur l’implication du gouvernement d’Idriss Déby. Des voisins témoignent de l’arrestation musclée de Yorongar, chez lui, par une dizaine de soldats qui l’ont poussé dans une Toyota beige, la voiture standard de l’armée tchadienne, sans plaque d’immatriculation. La description précise des uniformes des militaires, avec leurs épaulettes jaunes, ne laisse pas de doutes sur leur appartenance aux forces régulières. Deux heures plus tard, Ibni Oumar Mahamat Saleh subissait le même sort. Il y a une dizaine de jours, le ministre de l’Intérieur tchadien, Ahmat Mahamat Bachir, affirmait que les deux opposants avaient été enlevés lorsque les quartiers de la capitale étaient aux mains des rebelles. Mais l’enquête a démenti ces affirmations, indiquant que «dans chacun des cas , les forces de sécurité du gouvernement avaient repris un contrôle total des quartiers en question avant l’heure indiquée de leur détention». Le gouvernement a fait croire à une «réapparition» de Yorongar près de son domicile. C’était une fausse nouvelle et la famille dénonce «une torture morale».

    HRW s’est penché sur le cas d’un troisième opposant, Lol Mahamat Choua, figure de proue de l’opposition, mystérieusement retrouvé dans une prison militaire une semaine après sa disparition. Celui que les autorités ont décrit comme un «prisonnier de guerre», «capturé sur le champ de bataille» en plein QG des rebelles, a lui aussi été embarqué à son domicile dans cette même journée du 3 février. Là encore, deux témoignages concordants accablent le pouvoir. Les soldats qui ont procédé à l’arrestation de Choua étaient armés de fusils noirs, l’arme réservée aux soldats de la Garde présidentielle. Choua est toujours détenu sans chef d’accusation dans une prison militaire de N’Djamena, privé de la visite de sa famille ou de son avocat. Cette vague d’arrestations aurait pu faire beaucoup plus de victimes, comme l’indique le rapport ; de nombreux opposants n’ont dû leur salut qu’à une plongée dans la clandestinité.

    «Argent comptant». Pour Reed Brody, un des responsables de l’ONG, «il est impossible de savoir si les opposants arrêtés sont encore en vie». Ce ne sont certes pas les annonces contradictoires du gouvernement tchadien qui permettent d’en savoir plus. Les ministres des Affaires étrangères des Vingt-Sept ont tous exprimé leur «profonde inquiétude concernant l’arrestation de membres de l’opposition politique non armée du Tchad».«la tendance de Paris à donner du crédit aux affirmations des officiels tchadiens, qu’ils semblent prendre pour argent comptant». Pour certains enquêteurs de l’ONG, il semblerait «très étonnant» que les autorités françaises n’aient pas été au courant de ces arrestations depuis le début. La France insiste sur la nécessité d’avoir des informations sur leur sort. Mais Reed Brody déplore «la tendance de Paris à donner du crédit aux affirmations des officiels tchadiens, qu’ils semblent prendre pour argent comptant». Pour certains enquêteurs de l’ONG, il semblerait «très étonnant» que les autorités françaises n’aient pas été au courant de ces arrestations depuis le début.


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